• Déclarations
02 juillet, 2021

Pas un pays de simples aspirations

Alors que les récits déchirants des survivants continuent d’être confirmés et que de plus en plus de tombes non marquées sont localisées sur les sites des pensionnats indiens, les Canadiens se sont collectivement efforcés de faire face à cette vérité. Alors qu’une autre attaque à caractère racial a été perpétrée, cette fois dans les rues de la banlieue de London, en Ontario, les Canadiens ont été forcés de faire face à la haine mortelle qui existe tout autour de nous. Alors que la pandémie se poursuit et que les rapports de violence, d’agression et de blâme malencontreux rendent les rues dangereuses pour de nombreuses personnes, les Canadiens sont confrontés à la réalité que ce pays n’est pas à la hauteur de l’image idéaliste qu’on lui prête depuis si longtemps.

Beaucoup ne se sentent pas en sécurité en raison de la hausse des crimes haineux violents, comme on peut le constater partout au pays. De nombreuses personnes âgées ont peur de sortir de chez elles, et certaines ont peur de porter leur couvre-chef. Certains ont retiré leur Mézouza de leur porte, tandis que d’autres s’inquiètent de la discrimination dont leurs enfants feront l’objet de la part de la police.

Pour certains, ces événements ont été un choc et ont ébranlé leur sentiment d’identité et de fierté nationales. Pour d’autres, le caractère insensible et tangible des tombes non marquées a rendu plus viscéral le nombre de décès confirmés publié par la Commission Vérité et Réconciliation. Et pour les familles et les communautés qui vivent ces réalités au quotidien, dont certains enfants et proches ne rentreront jamais chez eux, c’est une période de deuil.

Pour beaucoup de ceux qui sont arrivés sur ces côtes en quête d’une vie meilleure, la prise de conscience de l’existence d’un pays fondé sur le génocide donne un sentiment de déception. Pour eux, ce pays représentait l’espoir, la sécurité et une chance de donner à leurs enfants une vie meilleure. Ce n’est que maintenant qu’ils réalisent que la promesse du Canada a été construite sur un socle de déplacements et de douleurs infligés aux premiers peuples de ces terres.

En réponse à tout cela, nous avons vu des drapeaux en berne, entendu des appels à la responsabilité, assisté à des cérémonies, des veillées et des rassemblements et, aux yeux de la communauté internationale, nous avons constaté des fissures dans le vernis du Canada. Tout cela laisse entrevoir la possibilité d’une puissante confrontation. Il est temps que toute la vérité de notre histoire et de nos réalités actuelles fasse partie de l’identité nationale de ce pays.

Le Canada n’est pas seulement ce qui s’est passé dans le passé, ou la réalité du présent, car dans une identité en constante évolution, il y a l’espoir d’un avenir meilleur. Notre histoire nous a vu infliger beaucoup de douleur, mais aussi faire des sacrifices qui nous ont amenés là où nous sommes aujourd’hui. Certains d’entre nous ne verront que la fierté de voir comment nos réalisations ont amélioré leur vie. D’autres ne verront que la douleur que nos échecs ont infligée à eux-mêmes et aux autres, mais collectivement, nous devons voir les deux. Un pays qui a la force et l’humilité d’évoluer et de s’améliorer continuellement n’est pas un pays de simples aspirations.

Aujourd’hui, plutôt que de célébrer l’humble exceptionnalisme qui en est venu à définir notre identité collective, faisons place au chagrin multigénérationnel qui a été ramené à la surface par les tombes non marquées des sites des pensionnats des Premières nations Tk’emlúps te Secwepemc et Cowessess. Ne nous contentons pas de réfléchir profondément aux actes de haine et de violence, mais prenons des mesures pour nous assurer qu’il n’y a pas de place pour le racisme, quel qu’il soit, dans ce pays.

Beaucoup verront cette journée comme un moment de réflexion, certains y trouveront de la joie ou de la fierté, d’autres tenteront de détourner le regard. Cette fête du Canada ne peut pas être la même que les précédentes, mais en reconnaissant tout ce que nous sommes, nous devons aussi trouver de l’espoir dans ce que nous pouvons devenir.

Mohammed Hashim
Directeur Général
Fondation canadien des relations raciales

Carey Newman
Professeur Audain
Université de Victoria

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