• Déclarations
30 juin, 2023

Le nouveau péril jaune : 100 ans depuis la loi sur l’exclusion des Chinois

L’histoire nous a appris que les communautés racialisées ont beaucoup à craindre lorsque la sécurité nationale implique leurs identités.

Alors que nous soulignons le 100e anniversaire de la loi sur l’exclusion des Chinois, nous devons reconnaître qu’une peur et anxiété sous-jacentes continuent de permettre aux identités ethnoculturelles d’être perçues comme des menaces à la sécurité nationale.

La Loi était une pièce de législation raciste et antichinoise qui a renforcé des lois existantes telles que la Loi de l’immigration chinoise de 1885, qui incluait une variété de « taxes sur tête » et autres mesures pour décourager l’immigration provenant de Chine. Elle interdisait aux conjoints et aux enfants immigrants de se joindre à la population chinoise principalement masculine au Canada et obligeait toute personne chinoise vivant au Canada, même celles nées ici, à s’enregistrer auprès du gouvernement et posséder des certificats, avec photo d’identification, sous peine d’amendes, de détention ou de déportation.

Les sociétés ont souvent tendance à se diviser en camps de « nous » contre « eux » en période de menace ou d’opportunité. Malgré notre travail collectif continu en vue de la réparation, de la réconciliation et de la construction dans un esprit d’équité, le Canada ne fait pas exception. Nous l’avons fait aux Canadiens d’origine chinoise il y a 100 ans, nous l’avons fait aux Canadiens d’origine japonaise pendant la Seconde Guerre mondiale, nous l’avons fait aux musulmans après le 11 septembre et nous avons continué à répéter ce schéma tragique et inutile avec d’autres groupes.

Cent ans après l’adoption de la loi d’exclusion des Chinois, nous sommes présentement dans une nouvelle vague de racisme anti-asiatique. Chaque jour, dans les médias, nous entendons parler d’interférences chinoises, de manipulations électorales, de vol de propriété intellectuelle, de liens présumés entre la recherche universitaire et les opérations militaires et bien d’autres encore.

Certaines de ces allégations peuvent nécessiter une enquête et être adressées. Cependant, les dommages collatéraux résultant de l’application de politiques publiques en réponse à la peur pèsent bien trop souvent sur les communautés racialisées. Après le 11 septembre, les musulmans ont été perçus comme un ennemi collectif légitime. Des politiques telles que la liste des personnes interdites de vol, le projet de loi C-51, ainsi que des idées telles que l’interdiction de la loi islamique et des prétendues « pratiques culturelles barbares » ont toutes eu des répercussions racistes sur des personnes innocentes, renforçant une culture de méfiance et de suspicion mutuelle.

Je constate une tendance préoccupante, dans ce qui est arrivé aux musulmans il y a deux décennies et à de nombreuses autres communautés avant cela, qui se répète aujourd’hui avec les Canadiens d’origine chinoise. La peur d’une ingérence étrangère alimente les appels à un registre. La crainte de la militarisation de la recherche a conduit à l’interdiction des partenariats académiques, même dans le cadre de bourses conjointes à des fins commerciales ou environnementales. Les accusations de manipulation des élections poussent les politiciens à prendre leurs distances les uns avec les autres.

La peur nous fait descendre sur une pente très glissante.

J’ai récemment entendu parler d’une jeune femme qui s’était fait terroriser par des agents frontaliers qui lui posaient des questions sur le fait qu’elle pourrait être une espionne du gouvernement chinois. J’ai également entendu parler d’un professeur titulaire qui effectue des recherches importantes, dont le nom a été retiré des demandes de financement, parce que son équipe ne voulait pas attirer l’attention. Les communautés qui portent le fardeau d’être une minorité réagissent souvent en se taisant et en se retirant. Ne pas en parler. Faire avec. Ne pas causer de problèmes.

Au-delà de cela, il y a un silence assourdissant, car même ceux qui souhaitent s’exprimer et se dissocier des actions du gouvernement chinois peuvent avoir des membres de leur famille ou des partenaires d’affaires là-bas et ils pourraient les mettre en danger. Pour certains, la Chine n’est pas un vilain diabolisé. C’est, ou c’était, leur foyer, et c’est là où se trouve leur famille. Ce n’est pas un enjeu unidimensionnel.

La Fondation Canadienne des relations raciale a été créée au lendemain d’atrocités racistes commises par le gouvernement canadien, lorsque les Canadiens d’origine japonaise ont été expulsés de leur maison, incarcérés dans des camps et expulsés du Canada durant et après la Seconde Guerre mondiale. Notre engagement est de combattre le racisme au Canada et renforcer le tissu social de notre société pour empêcher que d’autres terribles histoires se répètent.

Mais la direction que nous prenons en tant que pays aujourd’hui est très préoccupante. À maintes reprises, nous avons appris ce qu’il en coûte de permettre aux menaces réelles et perçues pour la sécurité nationale de compromettre les libertés civiles et de semer la division. Nous avons agi par peur et pris des mesures inacceptables et inutiles contre les nôtres.

Nous avons eu au moins 100 ans depuis la loi sur l’exclusion des Chinois pour apprendre comment faire mieux. Nous ne pouvons nous permettre de reculer maintenant.

Mohammed Hashim, Directeur général, Fondation canadienne des relations raciales



La FCRR est fière de soutenir d’importants projets menés par des partenaires communautaires chinois et asiatiques canadiens, d’un océan à l’autre, grâce au Fonds national de lutte contre le racisme, incluant :

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