- Déclarations
Journée nationale de commémoration de l’attentat de la mosquée de Québec et action contre l’islamophobie.
Lettre à l’honorable Steven Guilbeault, ministre du Patrimoine canadien
28 janvier 2021
Concernant : Journée nationale de commémoration de l’attentat de la mosquée de Québec et action contre l’islamophobie.
Monsieur le ministre Guilbeault,
Il y a quatre ans, j’ai été l’un des rares à venir témoigner et à soutenir la communauté lorsque nous avons appris ce qui s’était passé à la mosquée au Québec. Nous avons tenu la main de ceux qui souffraient. Nous avons écouté leurs histoires. Nous avons ressenti leur agonie et nous avons partagé leurs larmes.
Il y avait une petite fille dans la mosquée cette nuit-là, qui courait à l’arrière de la mosquée, comme la plupart des enfants, pendant que son père dirigeait les prières. Lorsque le tireur est entré dans la mosquée, elle a vu son propre père se faire tirer dessus. J’ai entendu dire que si elle a survécu, c’est parce que les hommes à l’arrière ont sauté sur elle pour la protéger des balles. Son père a été hospitalisé et heureusement, il a survécu. Six hommes ont perdu la vie à cause des balles cette nuit-là, mais il y a beaucoup plus de victimes de blessures physiques et émotionnelles.
La nuit suivant le massacre, une vigile massive a eu lieu de l’autre côté de la rue de la mosquée, sur le terrain d’une église construite au sommet d’une colline. Des dizaines de milliers de personnes y ont assisté. Tous les dirigeants des partis nationaux y ont assisté et se sont tenus aux côtés du Premier ministre Trudeau. Pour la première fois depuis longtemps, on avait l’impression que les Canadiens ressentaient et comprenaient enfin la douleur et les conséquences de l’islamophobie que la communauté musulmane vivait depuis longtemps.
L’esprit d’unité politique, religieuse et ethnique a cependant été coupé court à un débat amer sur la condamnation du mot « islamophobie », via M103. Cette motion était censée reconnaître la douleur de la haine, mais elle a au contraire déclenché une dispute viscérale qui a rouvert et approfondi les blessures persistantes.
Juste avant le premier anniversaire de l’attaque, Amira Elghawaby et moi-même avons conçu une campagne du Conseil national des musulmans canadiens (CNMC) pour que le gouvernement fédéral reconnaisse le 29 janvier comme « Journée nationale de commémoration et d’action contre l’islamophobie ». Le conseil municipal de Toronto est devenu le premier organe élu à adopter une motion visant à reconnaître cette journée, grâce au travail acharné de Neethan Shan, alors conseiller municipal, et de Sanaa Ali-Mohammed, alors stagiaire du l’Association des Jeunes Musulmans.
De nombreuses municipalités ont suivi, et même la province de l’Ontario a adopté un projet de loi d’initiative parlementaire, présenté par le député Berns-McGown, en première et deuxième lectures de l’assemblée législative. Le mouvement syndical du pays a également soutenu ce travail, notamment le Congrès du travail du Canada et les conseils et fédérations du travail de tout le pays.
Bien que ce geste symbolique ait été apprécié par des milliers de musulmans à travers le pays – un geste qui reconnaît la douleur collective ressentie par les musulmans canadiens – nous pensons qu’il faut faire beaucoup plus pour lutter efficacement contre la haine, tant en ligne que face à face.
Je suis honoré d’être un fonctionnaire de ce gouvernement en ce jour. Et je vous suis particulièrement reconnaissant, à vous, ministre Guilbeault, à votre équipe et à tous les députés concernés, pour le leadership dont ils ont fait preuve en reconnaissant le 29 janvier comme Journée nationale de commémoration de l’attentat de la mosquée de Québec et d’action contre l’islamophobie.
Il faut du courage, surtout dans le climat actuel, mais je suis ému par ce geste et j’espère qu’il servira à rappeler aux générations futures que nos paroles et nos actes comptent.
Je vous remercie sincèrement,
Mohammed Hashim
Directeur exécutif,
Fondation canadienne des relations raciales